Publié le 31 Juillet 2014
Une seule personne saura
toujours quand vous
direz
un mensonge. Vous.
Bruno MONTAGNES
Le blog photos de Chatillon sur Indre et de son canton
Entre Berry et Touraine, Chatillon sur Indre situé au bord de l'Indre vous offre un lieu de repos et de quiétude ou il fait bon se ressourcer.
Publié le 31 Juillet 2014
Une seule personne saura
toujours quand vous
direz
un mensonge. Vous.
Bruno MONTAGNES
Publié le 30 Juillet 2014
La politique ! Le meilleur moyen de
te brouiller avec le monde entier sans
en connaitre le motif.
Bruno MONTAGNES
Publié le 28 Juillet 2014
Abeille,pollen et fleurs.Chatillon sur Indre.Fonds d'écrans gratuits libres de droits.Par Jipé
Publié le 10 Juillet 2014
Une jolie découverte dans un coin de Châtillon /Indre
Nouvelle châtillonnaise à la suite d’un coup de cœur pour une maison atypique adossée aux remparts du château, je ne connaissais pas cette ville.
Par hasard, à 100 m de ma nouvelle résidence, je découvre un parcours de pêche tout au long des bras de l’Indre dans un cadre fleuri et champêtre. La pêche, j’adore, bien que modeste pêcheuse, mais les petits gardons me suffisent pour une agréable friture qui fait le régal de mon mari.
Et puis, c’est un endroit idéal pour des rencontres avec d’autres pêcheurs, des modestes comme moi, des jeunes, des moins jeunes, des chevronnés guettant le brochet.
Endroit idéal pour les promeneurs, pour les familles, pour les enfants, car dans ce même lieu, il y a toutes sortes de distractions : piscine avec toboggan, belle aire de jeux, etc.
Je pense être au début de mes découvertes et je l’espère, et si j’en fais d’autres aussi agréables, j’ajouterai quelques lignes à ce texte.
N d G
Remerciements pour ce gentil témoignage à Nelly de Gossellin que j'ai surpris une fin d'aprés midi en train de taquiner le poisson.Rare sont les dâmes qui exercent ce passe temps.
Publié le 9 Juillet 2014
UN CANAL
C’était un beau mois de novembre comme il n’y en a qu’à Paris, avec un soleil qui fait croire que l’air est pur, si pur que quand on le respire sous les marronniers des quais de Seine, trébuchant un peu sur les bogues qui n’ont pas encore été balayées, on se croit sur un sentier, à la campagne.
Il y a des gens qui malgré le froid décident de prendre leur café en terrasse, en fuyant même les radiants cachés sous les grands stores.
Un bel automne qui donne envie de se promener, sans but et de regarder tout autour de soi, buvant le spectacle des passants, des voitures, des façades blanches d’avoir été ravalées. Tout parait propre.
Etienne Leroux, Tinny pour ses copains, avait dix-neuf ans. Il était plutôt petit, blond avec une mèche toute raide qui lui tombait sur l’œil droit. L’expression du visage semblait volontairement « inexpressive » car derrière la mèche l’œil brillait, vif et moqueur. Il portait l’uniforme des gens de son âge : polo avec un logo incompréhensible, jean délavé avec accrocs, par-dessus, une veste de daim synthétique sali aux frottements. Aux pieds des basquets traînants, anciennement blancs, et dont on avait jeté les lacets dans la première poubelle venue. Le tableau sera complet quand on ajoutera les mains enfoncées dans les poches, comme pour faire glisser le pantalon au sol.
Tinny cherchait du travail, mais, ni sa tenue, ni sa dégaine, ne facilitaient les choses ! Pourtant il était courageux, même si cela ne se voyait pas.
Il marchait sur le trottoir de la rue de Bercy sans se rendre compte de cet automne qui l’entourait. Il allait de son pas glissant jusqu’à l’agence de l’ANPE. Il se planta devant un panneau apparemment réservé aux emplois sans qualification, trop souvent des emplois de quelques jours, d’une semaine au mieux.
Au milieu de toutes les petites affichettes, il y avait une demande pour un emploi apparemment permanent, un emploi sur une péniche. Il trouva ça amusant et prit les références de la fiche.
Le conseiller lui confirma que cet emploi n’était pas temporaire, mais il ne fallait pas qu’il ait d’attache, car la péniche faisait toute l’Europe. Il ne fallait pas non plus compter son temps : le candidat devait aider en toute chose le marinier qui était seul à bord avec sa femme. Enfin, côté salaire, rien que le minimum.
Etienne demanda comment avoir un rendez-vous. Le conseiller lui donna un numéro de téléphone portable, en ajoutant :
Depuis déjà deux ans, il ne s’en faisait plus, d’illusions : avec un BEP de mécanicien auto, il avait commencé par rechercher un travail dans sa branche,
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Publié le 9 Juillet 2014
puis dans une autre. Aujourd’hui il ne regardait plus que le panneau des « sans qualification ».
Il essaya de téléphoner sur le trottoir même de la rue de Bercy : sur messagerie, évidemment ! Il laissa ses coordonnées pour qu’on le rappelle : si le marinier était toujours intéressé, le téléphone d’Etienne, lui, serait toujours ouvert. De son pas amorphe, il remonta le boulevard de Bercy jusqu’à la station de métro Dugommier et entra dans un café aux murs presque noirs, seuls brillaient deux flippers et le zinc cuivré du bar. Il s’assit à une table où ils étaient déjà trois, trois copains : il connaissait tout le monde et le patron lui apporta son coca sans rien demander. En hurlant à cause de la sono à fond :
Il ne dit pas ça parce qu’il le croyait, mais pour se rendre intéressant, épater les autres qui resteraient là, à gâter leur jeunesse dans Paris.
Il n’épata personne : Jeannot constata :
Tous riaient.
C’est vrai que parmi la bande du café, il était le seul à accepter des petits boulots, des remplacements de quelques jours, il n’aimait pas traîner comme eux.
Son portable vibra dans son jeans, il sortit dans la rue.
C’était le marinier. Il n’avait toujours personne en vue, ils étaient à Vernon, ils devaient monter la Seine jusqu’à Poissy pour décharger et seraient au quai de Bercy dans deux jours. Qu’il soit là vers trois heures de l’après-midi, il lui montrerait le travail. La péniche s’appelait « La Clotilde ».
Il voulut rentrer au café pour leur dire, mais un flot de musique mi Rapp mi Techno débordait sur la rue. Il préféra rentrer chez lui.
Tinny n’avait pas pour habitudes de partir ainsi : cette ambiance, cette musique, c’était sa vie avec ses copains, un petit monde qui était le sien, peut-être pas très reluisant, tant pis !
Mais en cette fin de matinée voici que tout à coup il se sentit un peu bizarre, les choses lui semblaient avoir changé autour de lui. Il regardait le boulevard, la ville, d’une drôle de façon, tout devenait nouveau, trop animé et trop figé à la fois. Il préféra retourner dans sa chambre au fond d’une cour du faubourg Saint-Antoine.
Là non plus, il ne se sentait plus chez lui. C’était diffus, impalpable mais la chambre lui paraissait trop grande, il s’y sentait perdu. Par contre quand il regardait dehors, il trouvait la cour pavée, exiguë, sans perspective, l’atelier fermé d’un ébéniste parti depuis si longtemps que personne ne l’avait connu, écrasait
plus encore le paysage de sa fenêtre. Il se sentait enfermé dans une bulle trop grande au cœur d’un cube trop étroit.
Il sortit s’acheter une pizza à la « Baraque à Mario » toute proche. Il préféra l’engloutir sur un banc plutôt que la manger chez lui. Il marcha ensuite au hasard, cherchant un petit bar où le coca ne serait pas trop cher. Rue de Lyon, il passa devant une sorte de bistrot à la peinture toute écaillée. Sur la vitre de la porte qu’il poussa il y avait un vieil autocollant marqué Clacquesin sur un fond de petits sapins jaunes et rouges. Ce n’est qu’une fois assis à une table, qu’il vit sur une ardoise le nom du café : l’Avalant Il se demanda d’où venait ce nom bizarre. Etienne se rendit compte alors qu’il n’y avait pas un seul client comme lui. La plupart étaient
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Publié le 9 Juillet 2014
vieux, portant une casquette de marin plus ou moins crasseuse. Les autres, plus jeunes et plus rares, étaient en bleu de travail, bien charpentés, cheveux coupés court. Ils semblaient tous parler le même langage devant leur verre de vin blanc, certains, pipe en bouche.
Etienne essaya de comprendre ce qu’ils disaient, peine perdue : ils avaient des mots qu’il ne connaissait pas, ils disaient des villes ou des lieux qui lui étaient inconnus. Avant, il aurait eu une impression de solitude ou d’ennui, mais aujourd’hui, ça ne le gênait pas, il se laissait bercer par leurs voix, par ce contre-chant d’hommes virils devenus sirènes.
Certains entraient, d’autres sortaient, mais Etienne ne s’en apercevait pas.
Il ne vit pas non plus que qu’il faisait déjà nuit. Personne n’était venu lui proposer une autre consommation, comme dans tous les cafés. Embrumé par ces voix traversant les pipes fumantes, il s’imaginait dans un cocon. Il n’avait pas envie d’aller dans la rue : elle lui semblait froide et déserte, inhospitalière.
A l’heure du dîner, il était toujours là : la patronne, toute ronde sous un tablier à carreaux, lui demanda s’il voulait manger quelque chose :
Etienne ne savait pas ce que c’était. Il demanda seulement :
Ce n’était même pas le prix d’une pizza chez Mario.
Quand le plat fut devant lui, elle remporta le verre de coca vide.
Elle apporta un grand verre de rosé, empli à ras bord :
Il trouva cela bon. Il mangea tout. Le rosé coulait à plaisir.
Le café était compris, un café fort avec un peu de marc au fond de la tasse.
Les autres mangeaient aussi, à côté de lui, sans le voir. Et puis il y eut un sourire sur des chicots à la nicotine, un sourire qui semblait vouloir dire qu’il faisait un peu partie de la maison maintenant. Il se rendit compte qu’il attendait ce sourire pour oublier petit à petit le bar de la station Dugommier et ses copains bruyants et moqueurs.
Il ne partit qu’à la fermeture du bistrot. Il était tout étourdi d’être seul dehors dans le froid. Il se jeta sur son lit, déjà endormi.
Le lendemain matin il émergea d’un sommeil profond, plein des souvenirs de l’Avalant. Même son café noir ne dissipa pas cette sensation de fumée et d’hommes qui parlaient entre eux.
Il ne déjeuna pas ce jour là, il n’avait qu’une idée en tête, aller rôder autour du petit bistrot. Il passa devant plusieurs fois. Il ne savait pas pourquoi, mais il hésitait à entrer. Il continua un peu et lut sur une plaque « rue Villot ». Il ne la connaissait pas. Il continua encore son chemin jusqu’au parapet d’un quai, la Seine coulait juste là en dessous : il était quai de Bercy.
Il sourit de la coïncidence : les gens du café étaient des mariniers, tout simplement, pourquoi n’avait-il pas compris tout de suite ? Quand on est à la limite de deux mondes, on oublie petit à petit l’ancien, mais on ne comprend encore rien au nouveau. Peut-être était-il maintenant sans attache.
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Publié le 9 Juillet 2014
Au retour il poussa la porte du café. L’homme qui lui avait souri la veille, lui sourit encore. Il vint naturellement s’asseoir à sa table et lui demanda :
Etienne raconta l’ANPE, le rendez-vous le surlendemain quai de Bercy.
Comment il s’appelle le bateau ?
Ils souriaient tous cette fois.
Ils étaient tous debout autour de la table.
Un autre continua, pour illustrer :
Tinny les regarda rire d’un autre marinier comme eux, mais leur rire était chaud, un rire qui fait penser à quelqu’un qu’on aime bien.
Comme la veille, il resta jusqu’à la fermeture.
Le jour suivant, il avait toujours ce besoin de Seine, d’ambiance marinière. Levé bien plus tôt qu’à l’ordinaire il marchait rue de la Bastille au cœur d’une brume d’automne, légère, mais qui s’épaississait plus il approchait des quais de Seine. C’est à peine s’il voyait l’eau quand il s’engagea sur le pont de Bercy. Le spectacle était impressionnant : entrevoir ces bateaux qui passaient sous lui, sous le pont, masses sombres dans la brume, feux allumés, radars tournants, qui semblaient aller trop vite, prendre des risques.
Un métro passa derrière lui, sur le viaduc qui surplombait le pont. Quand il leva la tête, la rame fuyait par-dessus le brouillard, en ombre chinoise avec un grand soleil rose en toile de fond,.
A ses pieds, il avait laissé tomber un sac, son sac pour partir. Le patron de l’Avalant lui avait dit, entre deux souvenirs de l’époque où il naviguait à Dunkerque :
Alors, il avait laissé un mot à son propriétaire pour lui dire de lui garder la chambre, qu’il reviendrait, et il avait rempli un sac tout léger : le gros ce qu’il avait ne servirait pas sur un bateau. Il prit malgré tout ses vieilles santiags, parce qu’il les aimaient bien.
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Publié le 9 Juillet 2014
Maintenant la brume s’était levée, le ciel et l’eau étaient bleus, les bateaux avaient la coque noire et les superstructures de couleurs variées. Il y en avait de toutes les formes. Etienne fut surtout impressionné par les pousseurs et leurs barges, vides ou pleines de sable ou de voitures neuves. Il fut intrigué par quelques péniches accouplées, comme si l’une était en panne ou voulait se faire véhiculer à l’œil. Les citernes pleines de produits pétroliers qui naviguaient si bas sur l’eau que le pont se trouvait balayé par la moindre vague, lui firent peur.
Comme il était bientôt l’heure de déjeuner, il revint vers l’Avalant. Il marchait lentement, car il n’avait pas faim, la poitrine serrée par la proximité de son rendez-vous de l’après-midi : il revenait vers le bistrot par l’habitude, peut-être parce qu’on l’y attendait.
Il est vrai que depuis ces deux jours, les patrons du café lui parlaient comme s’il faisait partie de leur famille, comme à leur fils qui allait embarquer sur une péniche. Il n’avait jamais connu cette ambiance là : ses parents étaient morts avant qu’il puisse se souvenir d’eux. Malgré une photo où il se voyait bébé dans le giron de sa mère, il n’avait pas de souvenir, même pas une vague impression, des moments où l’on se sent hors du temps, où la mémoire essaie de faire remonter à la surface des choses, et qu’elle n’y parvient pas.
D’après ce que son oncle parisien lui avait dit, la voiture de ses parents avait été percutée par un bus et était tombée dans la Garonne à Marmande. Le fleuve était en crue et on ne retrouva jamais les corps.
C’est donc à cet oncle, sa seule famille à peu près honorable, qu’il fut confié. En réalité, il n’eut que le gîte et le couvert, et encore, à condition de le mettre lui-même. L’oncle Adrien avait quelque fortune, mais se plaisait à la dépenser avec tout ce qui portait des petites culottes et avait au moins trente ans de moins que lui. C’est ainsi qu’il dilapida son bien et celui de son neveu. Au lieu de faire les études auxquelles il était promis, il se retrouva dans un lycée technique de banlieue à réussir brillamment son BEP de mécanicien auto !
Il y a quelques mois, son oncle était mort, comble d’infortune, seul dans son lit. Etienne refusa l’héritage de dettes et trouva un petit logement tout juste salubre dans le faubourg Saint-Antoine.
Et voilà que dans ce café, contre toute attente, il avait trouvé des parents mariniers. Des parents et des grands frères aussi, pas très raffinés, pas très sobres, pas très propres sur eux, mais pour lesquels il existait, ce qui était nouveau pour lui.
Quatorze heures trente ! Ils durent le pousser dehors car Etienne semblait rivé au sol par la peur. Pourtant, des patrons il en avait rencontrés, des entretiens d’embauche, il en avait subis, mais celui là, peut-être parce que cela se passait au bord de la Seine, sur un quai, pour monter dans un bateau et y vivre, celui-là était différent, comme si sa vie en dépendait.
A l’heure dite, il arriva au bord du quai, une péniche était en bas. C’était une belle grande péniche toute noire et blanche, avec un liseré rouge tout au long de la coque. Devant, sur le bord de l’étrave, il lut son nom, « Clotilde ». C’est vrai que le Maurice devait être doué pour la peinture : sa péniche avait un air tout neuf.
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Publié le 9 Juillet 2014
Un homme qu’il n’avait pas vu l’accosta :
Puis :
Il avait appris au café à parler presque comme les mariniers.
Les patrons ne demandent jamais ça d’habitude : pour un travail normal on n’est pas obligé de tout quitter. Ici c’est par ça qu’on commençait !
C’est après seulement qu’il lui demanda ce qu’il savait faire.
Il parla de son BEP.
Etienne sourit intérieurement en repensant à ce qu’on disait à l’Avalant.
Ils firent le tour du bateau, le patron souleva un panneau d’écoutille pour lui montrer la cale vide :
Il montra les deux ancres géantes
Pour Étienne c’était encore un langage différent de celui du café.
Dans la salle des machines, il découvrit un beau gros diesel comme il les aimait. Autant le bateau brillait à l’image d’un sou neuf à l’extérieur et dans la cale, autant ici saleté et désordre régnaient en maîtres : il y avait des chiffons et des outils couverts de graisse partout. Maurice Bellestre n’était pas mécanicien, ça se voyait : les autres mariniers avaient raison.
Ils rentrèrent dans la timonerie, en lui montrant la roue du gouvernail :
Descendus dans le carré, ils s’assirent autour de la petite table.
Un coca, ça ne ferait peut-être pas bon genre, et puis pas d’alcool, le message était clair :
Eh bien tu as toutes les qualités. Ce n’est pas toi qui passerais tes journées à l’Avalant comme la moitié des mariniers quand ils sont ici !
Etienne dit que oui.
Après le jus d’orange, tout naturellement, le patron lui montra une petite cabine à l’avant du bateau.
Pendant que son patron traversait le pont de Bercy pour se rendre en face, quai d’Austerlitz, Etienne fit une petite visite à l’Avalant pour dire au revoir. La patronne l’embrassa et son mari lui donna une grosse claque entre les deux épaules.
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Publié le 9 Juillet 2014
Premier largage. Les amarres étaient prises dans des bittes qui ressemblaient à de gros champignons marron écrasés d’un côté. Etienne les dégagea et les lança sur le pont de la péniche, puis il sauta à bord et les rangea bien en cercle comme le patron avait dit.
La péniche battit en arrière pour se dégager du quai, et lentement s’intégra dans le flux des bateaux. Elle passa presque tout de suite sous le pont de Bercy. Etienne pensa que le matin il était encore là haut. Il regarda sous l’arche, il y avait des stalactites blanchâtres qui tombaient des joints de pierre.
Il commença par nettoyer le pont à grande eau en faisant attention à ne pas mouiller les panneaux d’écoutille. Ce faisant il regardait autour de lui, les bateaux qu’on croisait, les pêcheurs sur les quais, les arbres, les immeubles : jamais il ne s’était imaginé Paris comme cela. Sur l’eau, on ne voit pas les choses de la même façon. Il repensa à la question du patron qui lui demandait s’il était prêt à quitter sa vie à terre. Il se sentit bien de l’avoir quittée, cette vie, comme un oiseau qui s’envole de sa cage.
La péniche passa le confluent de la Marne qu’on laissa à gauche, Etienne n’arrivait pas encore à dire bâbord ou tribord ! Peu après le patron l’envoya à la proue car on arrivait à l’écluse d’Alfortville, son premier éclusage. Il fallut attendre quelques minutes pour écluser car les deux sas étaient pleins. Quand les avalants sortirent, Bellestre pilota doucement vers le sas vide. Etienne sauta sur le plateau de gauche et enroula l’amarre d’avant à un bollard[1]. Il fit la même manœuvre à l’arrière.
Il n’y avait rien à y redire.
En attendant que les portes aval se referment, Etienne regardait tout autour de lui, impressionné : l’écluse donnait une sensation de gigantisme, avec ses deux bassins dont chacun pouvait contenir jusqu’à six péniches et, surplombant l’ouvrage, une véritable tour de contrôle. Il chercha à apercevoir les éclusiers, mais les vitres étaient trop loin et trop teintées.
Maintenant l’eau descendait et les amarres filaient entre ses doigts. De chaque coté il y avait deux grands murs mouillés, les bajoyers[2], couverts de petites algues verdâtres.
Les portes amont s’ouvraient maintenant :
A l’arrière, Etienne eut un peu de mal car l’amarre s’était coincée dans une gorge faite dans la pierre par les filins métalliques des pousseurs.
Ils poursuivirent leur montée de la Seine. Etienne à côté du poste de pilotage, regardait défiler les maisons, le plus souvent des pavillons, des usines aussi. Suzanne, la patronne qu’il n’avait vu que de loin, le rejoignit. Ils se serrèrent la main. Elle avait une poigne d’homme :
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Publié le 9 Juillet 2014
Le jour baissant, il fallait trouver où s’amarrer. En général, sur la Seine, avant ou après les écluses, des pontons avec des pieux de béton sont prévus, mais ils étaient déjà occupés et il fallut se mettre en double, côte à côte avec la première péniche. Etienne pensa qu'ils n’allaient pas être chez eux, il n’osait pas penser, chez moi. Mais il se trompait : les mariniers sont discrets, même quand ils ont un peu trop bu : après quelques mots échangés sur le fleuve et les travaux aux écluses, sur d’autres mariniers qu’ils connaissaient tous les deux, chacun rentra chez soi manger la soupe. Les femmes se firent seulement des sourires « entre voisines », pas davantage.
Ils étaient maintenant tous les trois autour de la table du carré. Les assiettes étaient posées sur une toile cirée à fleur. La gazinière lui faisait chaud dans le dos. En dehors de la télévision que le patron ne regardait pas, chacun mangeait en silence. Pourtant ce silence était chaleureux, le silence de gens qui se connaissent, qui s’apprécient ou qui commencent à se connaître, qui n’ont pas besoin de parler pour s’exprimer. Etienne se sentait en famille, plus intimement qu’à l’Avalant, peut-être à cause de la petitesse de la pièce et du bouillonnement du fait-tout, derrière lui, sur la gazinière.
Le voyage se poursuivit le lendemain d’écluses en écluses, de villes en villes qui vues de l’eau ressemblaient plus à de gros villages : Corbeil, Melun, Moret. La rive gauche était plus pentue et ont y avait construit de belles grandes maisons de style normand, au milieu de pelouses à l’anglaise fraîchement tondues. Le bateau passait ainsi sans coup férir de débarcadères d’usine en parcs cossus.
La péniche vide allait bon train : avec son faible tirant d’eau, elle dominaient la plupart des bateaux qu’elle croisait ou qu’elle trématait[1]. Dans une grande ligne droite, Bellestre appela Etienne :
Avec les consignes d’usage :
Quand un autre vient en face, tu peux le croiser à bâbord ou à tribord. Comme tu débutes, laisse-le décider.
Et puis, tu as vu ces canoës qui s’amusent à ne s’écarter de l’étrave qu’au dernier moment. Tu les cornes et tu fais comme si ils n’étaient pas là. Quant aux pénichettes de plaisanciers, tu les doubles au plus près, ça ne leur fera pas de mal d’être un peu secouées, ajouta-il en riant.
Puis Bellestre le laissa seul... Enfin presque : du pont il jetait un coup d’oeil à bâbord puis à tribord, sans cesse en vigie !
La première angoisse passée, Etienne, prit la mesure de la péniche et de la barre. Il croisa plusieurs bateaux et un pousseur avec ses barges.
Le soir, il fallut faire étape à Saint-Mammès : se ravitailler en carburant sur la Seine en face du village, puis se rendre à la bourse d’affrètement pour confirmer le chargement de blé qu’ils allaient prendre à Montereau. Quand ils arrivèrent à la
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Publié le 9 Juillet 2014
nuit tombante, Etienne fit le plein de Gazole, mais la bourse était fermée depuis longtemps.
Ils accostèrent donc sur la rive gauche, là où il y avait déjà sur deux rangées, une bonne dizaine de péniches. Ils commencèrent la troisième.
Suzanne en profita pour aller faire son marché.
Sans rien ajouter, mais avec un clin d’œil pour Etienne, elle enjamba les bastingages des deux péniches qui la séparaient du quai.
Seuls entre hommes, Maurice raconta que derrière les maisons du quai il y avait une des curiosités de Saint-Mammès, les jardins bateliers. D'étroites ruelles pavées, presque invisibles, desservent une multitude de jardinets, parcelles utilisées à l'origine par les bateliers pendant les périodes de chômage ou d'étiage des canaux. Ces cultures permettaient de compléter leurs revenus, bien maigres à l’époque.
Au dîner, il avait une bouteille de coca devant lui. En temps normal, avant de se coucher, Etienne se serait promené à la nuit tombante dans ces petits jardins qu’il imaginait bucoliques et proprets.
Mais pour l’heure, il ne voulait pas quitter la péniche, il se sentait sous un charme qu’il ne voulait pas rompre, vivant d’autres émotions. Il préférait se gaver exclusivement de ces émotions de sa nouvelle vie de marinier.
Par contre, le matin suivant, il demanda à Bellestre s’il pouvait l’accompagner à la bourse d’affrètement (là il ne désertait pas la batellerie). Il n’y avait pas grand monde. Son patron lui expliqua qu’il y avait de moins en moins de péniches : le gros du trafic se faisait maintenant par des pousseurs appartenant à de grosses sociétés de transport qui ne pouvaient pas prendre les canaux au gabarit Freycinet, comme la Clotilde. Etienne sentit bien qu’il n’était pas bien gai et qu’il n’avait pas la moindre envie de finir en pilote de pousseur ! En ressortant, il illustra son propos, en lui montrant la rivière devant la bourse :
Une chance pas très florissante à en juger par l’expression du visage de Bellestre.
Ils continuèrent à remonter la Seine jusqu’au confluent avec l’Yonne à Montereau. C’est sur l’Yonne, après le pont de chemin de fer que se trouvait la coopérative agricole. Ils y arrivèrent vers midi.
Mais il allait encore falloir attendre : une péniche était en cours de chargement le long du quai, sous le silo. Une autre, amarrée plus loin, attendait son tour. Décidemment, la principale qualité d’un batelier pourrait bien être la patience…
Etienne se proposa d’aller faire un tour en salle des machines : la vieille, il était descendu et avait remis tout en ordre, jeté les chiffons sales, rangé les outils au tableau. En bon mécanicien, il avait prêté attention aux bruits du moteur : il lui avait semblé que la pompe à injection ne fonctionnait pas correctement, il y avait une sorte souffle qui pouvait signifier qu’une durite commençait à percer.
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Publié le 9 Juillet 2014
Il en avait touché deux mots au patron en lui demandant s’il avait la pièce en rechange. Son patron répondit par l’affirmative, ce qui l’étonna. À charge pour lui de la trouver dans le désordre ambiant !
Il finit par mettre la main dessus. Il ne fallait pas plus d’une heure pour la réparation, l’attente devant le silo fut bénéfique et la pompe ne souffla plus.
Satisfait de son travail, il vint rendre compte à Bellestre. Il n’eut en retour qu’un grognement et une volte face, mains dans le dos vers la poupe ! Sa femme qui avait assisté à la scène dut expliquer :
Effectivement, il l’appela peu après, comme si de rien n’était, pour lui demander d’empiler à l’avant les panneaux d’écoutille amovibles, afin de dégager complètement la cale. Pour ce faire, ils devaient se placer chacun d’un côté du bateau et saisir les lourds panneaux métalliques par leurs poignées.
Enfin leur tour arriva : ils se rangèrent sous le boisseau mobile approvisionné par un transporteur à tapis. Bientôt une pluie de blé commença à remplir la cale le plus régulièrement possible. Le boisseau se déplaçait petit à petit, formant de larges pyramides dorées qui se télescopaient d’un bout à l’autre de la soute. La cargaison étant pesée à la sortie du silo, et Bellestre n’eut qu’à signer la fiche informatique : le chargement était terminé.
Il ne restait qu’à remettre en place les panneaux d’écoutille et à vérifier leur parfaite étanchéité.
La péniche reprit sa route, cette fois en remontant l’Yonne. Ils firent escale à Sens, car la péniche, maintenant chargée, naviguait plus lentement, peinait à contre-courant avec son tirant d’eau élevé. Etienne n’avait plus la même vision des choses, la berge semblait plus hautes, les bateaux vides qu’ils croisaient, plus impressionnants.
Les écluses devenaient plus difficiles car les bajoyers étaient en pente : en montant le bateau glissait très loin des bollards et l’éclusier devait leur envoyer une perche avec un crochet dans lequel Etienne passait l’amarre. Pour sortir, il fallait veiller à rester bien au milieu pour que la coque ne frotte pas sur les pierres invisibles sous l’eau.
Etienne, habitué maintenant aux grandes écluses de la Seine, avait été très étonné par l’étroitesse des ouvrages, des écluses en particulier.
Le patron avait ri :
Il était un peu original, Bellestre, au fond il n’aimait pas trop utiliser les mots sacralisés par les anciens de la profession qui auraient dit proue au lieu de nez…
Bellestre avait planifié leur journée du lendemain : on partirait de Sens à l’aube, on passerait Migennes où on laisserait l’Yonne à droite pour entrer dans le canal de Bourgogne. On naviguerait jusqu’à la halte de Saint Florentin où on mouillerait pour la nuit.
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Publié le 9 Juillet 2014
Maintenant le passage aux écluses était différent, plus chaleureux : les éclusier connaissaient la Clotilde, les Bellestre. On parlait de l’état du canal, d’Etienne qu’ils n’avaient jamais vu.
Il y avait aussi de scènes de tous les jours : une petite fille en bicyclette avec un talkie-walkie qui appelait son papa en lui demandant sans cesse :
Il y avait eu aussi une jeune fille qui faisait la manœuvre en l’absence de son père : Etienne avait un peu regardé sous sa jupe pendant que la péniche s’élevait vers l’amont. La fille l’avait vu et s’était reculé en riant.
En fin de journée, un méchant brouillard, – il y a quelquefois à cette saison – tomba et ils purent à peine écluser à Brienon. L’éclusier leur conseilla de s’amarrer tout près, juste après un méandre : il y avait là quelques bollards, souvenirs d’une ancienne carrière de pierre. Le brouillard était devenu si épais que l’accostage fut difficile : il leur fallut chercher les bittes d’amarrage à l’aveuglette, parfois en les heurtant du tibia.
Au matin, le brouillard était toujours aussi dense. On devait pourtant avancer. Etienne fut placé à la proue, avec pour rôle de guider le pilote en montrant du bras de quel côté il fallait aller. Pour mieux voir, Bellestre, avait levé les vitres à l’avant de la cabine de pilotage et Suzanne regardait partout pour alerter de la voix. Ils n’étaient pas trop de trois !
Tout allait bien malgré un parcours de plus en plus étroit et sinueux, quand à proximité de l’écluse de Saint-Florentin, dans un méandre plus serré que les autres et malgré les sémaphores d’Etienne, le bateau toucha l’enrochement par l’arrière. On entendit la coque frotter sur la pierre, puis une sorte de claquement sec, comme inachevé, la péniche s’immobilisa dans un silence total, moteur calé sans doute.
Les trois mariniers perdirent la notion du temps pendant quelques secondes, jusqu’à ce que Bellestre profère un puissant :
et commence à engueuler tout le monde, brouillard compris.
Puis, le métier reprit le dessus : chacun inspecta une partie de la péniche, Bellestre la coque : pas de fuite apparente ; Suzanne confirma le bateau n’avait pas pris de gîte ; Etienne, dans la salle des machines, vérifia l’arbre de l’hélice : il n’était pas bloqué et se demanda pourquoi le moteur avait calé.
Bellestre décida donc de remettre le moteur en marche au point mort d’abord, puis en battant tout doucement en arrière. Le bateau répondit. On repartit en avant en serrant vers la rive opposée. La manœuvre réussit et Etienne, toujours devant cria qu’il voyait l’écluse de Saint-Florentin mais que les portes étaient fermées. Bellestre actionna la corne, pourtant rien ne bougea. Après plusieurs tentatives infructueuses, Etienne fut chargé de sauter à terre pour alerter l’éclusier. Comme il ne trouva personne, il aperçut un interphone au mur de la maison éclusière fermée. Il appuya sur le bouton rouge règlementaire, mais il n’eut aucune réponse. Il n’entendit même pas grésiller le haut-parleur. L’installation semblait hors d’usage.
Le patron prit son téléphone portable pour appeler le bureau du canal, mais il n’y avait pas de réseau.
Pour gagner du temps, la patronne rejoignit Etienne, mais quand ils voulurent fermer les portes amont, les crémaillères étaient bloquées, couvertes de rouille. C’était invraisemblable pour une écluse qui servait tous les jours !
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Publié le 9 Juillet 2014
Bellestre leur envoya une boite de graisse et des pinceaux ; après bien des efforts les portes se refermèrent. Heureusement, les vantelles aval acceptèrent de s’entrouvrir : la vidange du bassin prit près de dix minutes.
Suzanne et Etienne durent graisser également les portes aval qui ne s’ouvraient pas non plus. Jusque là Bellestre avait gardé son calme, mais on le sentait prêt à exploser. Il leur lança :
Il rentra la péniche si vite qu’elle frotta à tribord sur le mur de garde.
Etienne découvrait la vraie vie de marinier avec des moments de sérénité acquise par l’expérience et d’autres, faits de coups de gueules incontrôlés, mais sans doute nécessaires.
Ils continuèrent ainsi en direction de Tonnerre. Le brouillard s’était un peu levé au dessus de l’eau, mais ils restaient prudents. Par contre il était toujours si opaque sur la terre qu’ils avaient l’impression de naviguer dans un tunnel de nuages. Suzanne dit à son mari :
Bellestre était toujours à cran.
L’écluse de Tonnerre se trouvait à 26 Kms de là. Pourtant moins d’une heure plus tard, Etienne signala une écluse dont les portes étaient encore fermées
Il ajouta pour Etienne :
Etienne sauta sur la berge comme d’habitude :
Elle était aussi rouillée que celle de Saint-Florentin et tout aussi déserte. L’éclusage se fit plus lentement encore.
Cette fois ce fut Bellestre qui s’étonna :
Il regarda alors sur le linteau de la porte de la maison éclusière, rien n’était gravé non plus.
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Publié le 9 Juillet 2014
Etienne sentit qu’une certaine inquiétude gagnait le couple de mariniers.
On dirait qu’on s’est trompé de canal, qu’on est sur un canal désaffecté. Mais à Migennes, pas moyen de se tromper : ou on continue sur
Bien que sûr de lui, Bellestre sortit ses cartes, puis les replia sans rien dire. Cette fois l’inquiétude était bien là, avec un peu d’angoisse déjà.
Ne voulant pas croire ce qu’il voyait, le patron dit qu’on continuerait.
On continua en effet, on continua à naviguer dans le brouillard qui cachait le paysage, on continua à passer des écluses qui n’existaient pas.
On continua sans jamais rencontrer la moindre péniche.
Le soir on accosta en s’arrimant à des arbres morts entraperçus sur la berge.
Heureusement que Suzanne avait fait des provisions à Saint-Mammès, parce qu’il n’avaient vu aucune route, aucun pont qui auraient pu mener à un village. Pendant le dîner, ils allumèrent la télévision mais ne purent rien capter. Ils ne purent rien manger non plus tant les gorges étaient nouées.
Le jour suivant fut semblable au jour d’avant. Bellestre était de plus en plus sombre, Suzanne, de plus en plus apeurée, Etienne, regrettait de plus en plus sa vie parisienne. Personne ne comprenait ce qui leur arrivait ni ce qu’ils faisaient là.
Le patron sortit de son mutisme :
Ils regardèrent, mais ne virent qu’un canal étroit aux berges bien parallèles devant un mur de brouillard, entrecoupé d’écluses endormies qu’ils s’efforçaient de réveiller. Rien qui ne permettait à la péniche de faire demi-tour, même de tenter la manœuvre.
Le soir, épuisés dans leur corps et dans leur tête, ils se couchèrent cette sans même se mettre à table. Etienne avait demandé à dormir sur une couverture dans la timonerie : il avait peur tout seul dans sa petite cabine de proue.
Au lever du jour ils se trouvaient encore devant une porte d’écluse fermée. Mais derrière, le ciel paraissait plus clair. Etienne de la berge leur cria :
La joie revint sur les visages : on allait pouvoir faire demi-tour, enfin !
La porte était encore plus rouillée que les autres, mais après une heure d’effort la péniche put la franchir. De l’autre côté, le brouillard flottait, plus léger. On ne voyait toujours pas les rives, mais on avait une bonne vision de l’eau. Bellestre mena sa péniche assez loin pour éviter de toucher en virant de bord. Après la manœuvre, le bateau se retrouva face à la porte de garde qu’ils avaient laissé ouverte. Quand ils s’approchèrent, le brouillard se déchira : elle s’était refermée.
Leur joie s’effaça un peu mais Bellestre et Etienne prirent l’annexe et accostèrent le long de l’estacade de guidage, le mur de biais devant la porte. Ils commencèrent à manier les manivelles, mais la porte ne bougeait pas. C’est alors qu’ils s’aperçurent que les portes de bois étaient maintenant doublées à l’intérieur par un mur de pierres semblable à celui des bajoyers.
De retour sur la péniche ils dirent que la porte ne s’ouvrait plus.
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Publié le 9 Juillet 2014
Suzanne demanda pourquoi.
Pour ne pas l’inquiéter davantage Bellestre préféra répondre qu’au bord de l’étang il y avait à coup sûr une autre porte, une écluse, une rivière ou même un fleuve qui leur permettraient de poursuivre leur route.
Il suffisait d’en faire le tour, ni trop près de la rive pour ne pas s’échouer, ni trop loin pour voir. Le cabotage se poursuivit toute la matinée. Inlassablement, sans aucune trouée, la barrière de roseaux défilait le long du plat-bord de la péniche. Enfin ils aperçurent une porte, mais il s’agissait de la porte doublée de moellons qui maintenant leur faisait peur, comme ce qu’on ne comprend pas.
Ils naviguèrent ainsi tout le jour en repassant à chaque tour devant la porte murée.
Et ils jetèrent les deux ancres.
Au soir, tous les trois s’assirent autour de la table vide. Il n’y avait plus rien à manger que des gâteaux secs dont personne ne voulait, ils ne dirent plus rien puisqu’il n’y avait plus rien à dire. La télévision restait vide et il n’y avait toujours pas de réseau pour le téléphone.
Il monta sur le pont fumer une cigarette.
C’est alors qu’il se mit à crier :
Au loin, de l’autre côté de l’étang, il y avait des lumières !
Il fallait faire vite, démarrer le moteur, remonter les ancres avec le barbotin et naviguer en direction des lumières. En approchant ils se rendirent compte que les lumières formaient une véritable allée avec des lampadaires sur deux rangs.
La péniche pointa bientôt la proue à l’entrée d’un pont-canal. Les deux premiers lampadaires de style Napoléon III surmontaient chacun un obélisque de part et d’autre du chenal.
Ils eurent tous les trois envie de s’embrasser, le cauchemar était fini !
Au bout d’une demi-heure, ils naviguaient toujours sur le pont.
Bellestre commençait à se poser des questions :
Pourtant on avance bien constata-t-il en regardant filer les trottoirs rivetés et les lampadaires.
Toute la nuit ils traversèrent le pont qui semblait ne pas avoir de fin. Ils se relayaient pour surtout ne pas s’arrêter, car à nouveau ils avaient peur.
Pas une seule fois ils n’aperçurent de lumières autres que celles de l’ouvrage fluvial.
Lorsque le soleil se leva, les lampadaires s’éteignirent et ils virent la fin du pont. Exténués, ils rangèrent la bateau côté chemin de halage, sans même l’amarrer : que pouvait-il bien leur arriver maintenant ?
Ils dormirent d’un sommeil de brute jusqu’à plus de midi.
Au réveil, le brouillard les avait enfin quitté. Il laissait apparaître une plaine d’une platitude absolue, un champ de blé bleuâtre qui se perdait à l’infini, traversé par un canal, leur canal. Devant le blé, sur le chemin de halage, deux percherons pommelés semblaient attendre.
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Publié le 9 Juillet 2014
Bellestre, en bon marinier, jeta un regard en arrière : le pont-canal était en ruine. Les lampadaires pendaient la tête en bas, des pans entiers de poutrelles s’étaient détachés, formant de larges trous dans le pont maintenant à sec. Heureusement une porte métallique empêchait l’eau du canal de se déverser dans la vallée dont le fond se perdait dans le vide.
Il était évidemment dangereux de rester là, à la merci d’une simple porte. Bellestre dit alors qu’il fallait partir et vite. Il pénétra dans le poste de pilotage : à part la barre, il n’y avait plus rien de mécanique ou d’électrique dans l’habitacle ! Comment démarrer le moteur dans ces conditions. Il appela Etienne :
Le jeune homme remonta, effaré :
Le patron n’alla même pas vérifier. Il se contenta de sortir sur le pont et de regarder son bateau : le radar Furuno qui n’avait pas cessé de tourner depuis qu’ils étaient dans le brouillard, avait disparu ; les feux électriques étaient remplacés par des fanaux à pétrole.
Les panneaux d’écoutille, maintenant en bois, étaient surmontés d’un petit mât très fortement haubané : tout était ainsi à l’image d’une péniche du siècle précédent.
Bellestre eut l’impression que le bateau dominait davantage la berge, mais ce n’était sûrement qu’une impression. Il ne put toutefois s’empêcher de soulever un panneau d’écoutille : la cale était vide, seuls des rats en grand nombre se disputaient les quelques grains de blé qui restaient.
Il ne se contrôlait plus : pour un marinier c’est une honte plus grande que celle de casser une porte d’écluse en entrant dedans !
Il se calma un peu : il fallait à tout prix avancer.
C’est à ce moment qu’il comprit les chevaux : c’étaient eux qui allaient haler la péniche le long du chemin. D’ailleurs, ils étaient équipés d'un harnais particulier avec une attelle de collier et une bride avec oeillères, mors droit sans rênes. Des cordes pendaient des attelles.
Il comprit aussi le rôle du mât, c’était un mât de canal : il avait étudié dans des livres de batellerie les techniques de halage des péniches à l’époque : les chevaux, conduits par un charretier tiraient la péniche grâce à des longues cordes fixées en haut d’un mât.
Ils étaient revenus au début du dix-neuvième siècle !
Par contre, il n’y avait pas de charretier, pas non plus de foin à bord.
Etienne tiendrait le rôle de charretier, même s’il avait dit qu’il ne connaissait rien aux chevaux et que même, il en avait un peu peur.
On fixa les cordes comme sur les gravures anciennes. Les chevaux s’ébranlèrent avant qu’Etienne ait eu le temps de sauter sur la berge pour les conduire : on aurait pu croire qu’ils savaient ce qu’ils avaient à faire et là où ils devaient aller.
Pour maintenir le bateau bien droit, Bellestre devait tenir la barre pour que le gouvernail reste de biais et ainsi compenser le halage latéral des chevaux.
Ils avancèrent ainsi sans répit, les chevaux semblaient infatigables. Au loin, entre champ de blé gris et chemin, une baraque en planche surgit petit à petit dans le soir. Il y avait du foin dedans. Par peur de ces chevaux bizarres – mais qu’est-ce qui n’était pas bizarre dans leur voyage ? – ils détachèrent les cordes du mât. Les chevaux entrèrent dans la cabane pour la nuit, les cordes pendant dans l’eau.
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Publié le 9 Juillet 2014
Ils naviguèrent ainsi plusieurs jours. Ils n’avaient plus de quoi manger, mais ils n’avaient toujours pas faim, comme s’ils n’avaient plus besoin de manger pour vivre.
Maintenant, ils se laissaient faire. On ne pouvait pas parler de fatalisme, ce qui implique une impression d’échec, de dépit, de résignation. Non, ils étaient au contraire de plus en plus sereins, même sans savoir où ils allaient ni pourquoi ils y allaient.
Le quatrième jour après le pont-canal, devant eux, une barrière noire mit fin au champ de blé. En approchant ils virent que le canal s’enfonçait dans une forêt. Au début elle était claire, lumineuse presque, il y avait des couleurs partout, des fleurs sur les lianes, ce qui changeait du gris bleuâtre du blé. Ils eurent envie de courir sous les arbres, mais les chevaux étaient intraitables : l’heure n’était pas venue pour eux de se reposer.
Plus ils s’enfonçaient dans la forêt, plus les lianes devenaient envahissantes. Si envahissantes qu’elles finirent par former un véritable tissu végétal, un grand manteau qui recouvrait le canal formant une voûte, un tunnel. Petit à petit une nuit tomba. Une nuit parce qu’il leur fut impossible de dire si c’était la nuit du ciel ou la nuit des lianes.
Même si la péniche allait toujours de l’avant, ils ne voyaient plus les chevaux ; ils n’entendaient plus que le timbre des fers sur les pierres du chemin. Petit à petit, ce bruit s’estompa, pourtant les chevaux tiraient toujours ; puis le silence devint total et les cordes glissèrent dans l’eau : elles pendaient maintenant du petit mât, molles et inutiles. Ils pensèrent que leurs percherons étaient partis se reposer dans une cabane invisible, comme tous les soirs.
Comment avaient-ils pu se détacher eux-mêmes des cordes fixées à leurs attelles, et pourquoi la péniche continuait-elle à s’enfoncer, d’elle-même, dans le tunnel forestier ?
Suzanne le regarda et, comme on parle à un enfant :
Etienne, par habitude, regarda sa montre, elle s’était arrêtée. A bord, tout ce qui pouvait indiquer l’heure ou le jour était maintenant hors d’usage !
En fait depuis plusieurs jours ils ne dormaient plus et maintenant, tous les trois, ils regardaient sans cesse droit devant, comme des gens qui attendent quelque chose ou quelqu’un.
Dans un tunnel il y a toujours un bout, c’est en tous cas ce que l’on croit.
Ce tunnel là fit comme les autres : une heure, un jour, une semaine plus tard, comment savoir, ils devinèrent un point lumineux loin dans l’horizon noir qui les entourait. Il grossit peu à peu et bientôt il ressembla à un gros rond tout blanc qui les éblouissait.
Une fois encore ne s’étaient-ils réjouis trop vite, car la péniche avançait de plus en plus lentement ?
Au moment où allaient déboucher dans la lumière, elle était presque immobile et on aurait pu croire qu’elle allait entrer dans une écluse particulièrement difficile.
Derrière le hublot lumineux qui grandissait, ils ne voyaient rien.
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Publié le 9 Juillet 2014
Les trois mariniers se tenaient sur une même ligne, adossés à la cabine de pilotage, les pieds sur le premier panneau d’écoutille.
Quant le nez du bateau sortit de l’ombre il blanchit progressivement comme sous le coup d’un pinceau invisible, se confondant ainsi avec la lumière immaculée qui devenait omniprésente.
Bientôt toute la péniche devint aussi blanche qu’un paquebot de croisière méditerranéen. Seuls les hommes et leurs vêtements gardèrent leur couleur qui pâlit un peu malgré tout.
Les voilà maintenant sortis du tunnel infini, sortis et surpris de se retrouver au milieu d’un grand fleuve avec courant et tourbillons. Pourtant leur péniche n’avançait toujours qu’avec une lenteur excessive, se jouant ainsi des mouvements de l’eau.
Ils pouvaient distinguer des quais de part et d’autre, mais au-delà il semblait ne pas y avoir de ville, ni même de maison.
Le bateau lui avait apparemment choisi son quai car il se dirigeait maintenant vers un ponton de bois noir. Il décida curieusement de l’aborder par l’aval, ce qui obligerait l’équipage à l’arrimer solidement.
Mais ce monde ignorait les lois de la physique et de la navigation ! la péniche vint ranger là où elle voulait et, contre toute attente, s’immobilisa sans l’aide de personne.
Cela faisait trop longtemps qu’ils n’étaient pas descendus à terre et Etienne suivi des Ballestre sauta sur le ponton et gagna le quai. C’était un quai ordinaire, avec pavés et moellons. Ballestre s’étonna toutefois :
A ce moment, derrière eux, ils entendirent une longue série de craquements. Ils se retournèrent : leur péniche toute blanche partait à la dérive en suivant cette fois le courant, le ponton lui avait disparu : il ne restait le long du quai que quelques éclats de bois noir qui flottaient encore. Ils ne pourraient plus jamais quitter ce quai, d’ailleurs par le fleuve, personne ne pourrait jamais les rejoindre. Ils n’étaient plus que trois anciens mariniers perdus et solitaires !
Que faire sinon s’enfoncer dans le pays, tenter de trouver une maison, une ville peut-être ?
Ils marchaient depuis plusieurs minutes dans l’univers blanc qui les entourait. Le fleuve avait disparu derrière eux mais en face aucune forme, aucune ombre ne se dessinait.
Etienne avec des yeux plus jeune bondit :
Les Bellestre virent finalement eux aussi. On ne savait pas encore ce que s’était, mais il y avait quelque chose de tangible.
Plus ils avançaient, plus cela ressemblait à une maison, une haute maison de ville, une maison de rue sans la rue puisqu’elle était toute seule. Au rez-de-chaussée ils devinaient une partie plus foncée. C’était une sorte de magasin avec une vitrine.
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Publié le 9 Juillet 2014
En approchant encore Etienne reconnut un bistrot à la peinture toute écaillée qu’il connaissait bien : c’était l’Avalant.
Sur la vitre de la porte qu’ils poussèrent il y avait toujours ce vieil autocollant marqué Clacquesin sur un fond de petits sapins jaunes et rouges.
A l’intérieur, ils furent accueillis par les patrons. Ils ressemblaient à ceux qu’Etienne avait rencontrés à Paris, mais ce n’était pas eux. Pourtant la patronne l’embrassa et son mari lui donna une grosse claque entre les deux épaules en disant :
Bien sûr il y avait aussi nombre de mariniers dont un qui souriait sur des chicots, mais ce n’était pas non plus ceux de Paris.
Des questions fusèrent à l’adresse de Bellestre :
Plus ironiquement :
La patronne devant ses fourneaux :
A Etienne :
On était comme à Paris, le cadre, les gens, les questions, les réponses. Pourtant tout était différent, plus feutré, plus mesuré, le café ressemblait à un théâtre d’ombres chinoises avec des acteurs qui parlent derrière le décor.
Il y avait autres chose de différent : dans cet Avalant personne ne rentrait ni ne sortait jamais. Cette saynète n’aurait-elle pas été montée pour le seul public des mariniers de la Clotilde ?
D’ailleurs, après le déjeuner, Etienne avait voulu sortir dans la rue sans maison pour fumer une cigarette : il eut beau chercher, il ne trouva ni bouton ni porte.
Le patron qui l’avait observé lança :
Il pensa dire aux Bellestre qu’ils étaient prisonniers du bistrot mais il se tut car au fond cela n’avait aucune importance : ils étaient dans leur univers. Le temps pouvait passer ou ne pas passer, les patrons et les autres mariniers étaient des amis, presque des parents pour Etienne.
Tous les trois étaient heureux ainsi, d’un bonheur tranquille, en demi-teinte, de ces bonheurs qui durent à n’en plus finir.
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Publié le 9 Juillet 2014
En approchant encore Etienne reconnut un bistrot à la peinture toute écaillée qu’il connaissait bien : c’était l’Avalant.
Sur la vitre de la porte qu’ils poussèrent il y avait toujours ce vieil autocollant marqué Clacquesin sur un fond de petits sapins jaunes et rouges.
A l’intérieur, ils furent accueillis par les patrons. Ils ressemblaient à ceux qu’Etienne avait rencontrés à Paris, mais ce n’était pas eux. Pourtant la patronne l’embrassa et son mari lui donna une grosse claque entre les deux épaules en disant :
Bien sûr il y avait aussi nombre de mariniers dont un qui souriait sur des chicots, mais ce n’était pas non plus ceux de Paris.
Des questions fusèrent à l’adresse de Bellestre :
Plus ironiquement :
La patronne devant ses fourneaux :
A Etienne :
On était comme à Paris, le cadre, les gens, les questions, les réponses. Pourtant tout était différent, plus feutré, plus mesuré, le café ressemblait à un théâtre d’ombres chinoises avec des acteurs qui parlent derrière le décor.
Il y avait autres chose de différent : dans cet Avalant personne ne rentrait ni ne sortait jamais. Cette saynète n’aurait-elle pas été montée pour le seul public des mariniers de la Clotilde ?
D’ailleurs, après le déjeuner, Etienne avait voulu sortir dans la rue sans maison pour fumer une cigarette : il eut beau chercher, il ne trouva ni bouton ni porte.
Le patron qui l’avait observé lança :
Il pensa dire aux Bellestre qu’ils étaient prisonniers du bistrot mais il se tut car au fond cela n’avait aucune importance : ils étaient dans leur univers. Le temps pouvait passer ou ne pas passer, les patrons et les autres mariniers étaient des amis, presque des parents pour Etienne.
Tous les trois étaient heureux ainsi, d’un bonheur tranquille, en demi-teinte, de ces bonheurs qui durent à n’en plus finir.
Publié le 9 Juillet 2014
En première page de l’Yonne Républicaine on aurait pu lire en date du 29 novembre 1998 :
« Saint-Florentin
« Sur le Canal de Bourgogne, une péniche a sauté sur une bombe de la seconde guerre « mondiale qui n’avait pas explosé. Le bateau a pris feu immédiatement.
« Malgré l’intervention rapide des secours, la péniche a brûlé entièrement. Le Capitaine Lagrue, « de la gendarmerie de Tonnerre a déclaré qu’il n’y avait aucun espoir de retrouver des « survivants.
« Parmi les mariniers de « La Clotilde », il y avait Maurice Bellestre et sa femme Suzanne, « tous deux propriétaires du bateau, et leur employé, Etienne Leroux.
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Un grand merci à l'auteur Chatillonnai ,écrivain et romancier, auteur de cette nouvelle qui m'a permis de reproduire ce texte.